Quarante ans après !

Quarante ans ! Ça fait quarante ans, le double de chez Dumas Père…

Un courriel me demandait : Est-ce bien toi ? Ben oui, c’est assez facile à vérifier : j’ai un site, des photos, un nom inchangé moyennement répandu. Quant à lui c’était… le premier et je fus sa première. Bref, une première de part et d’autre avec les difficultés et les tâtonnements afférents.  La suite ne fut guère plus évidente, sans doute par ma faute : j’avais un rapport aux corps trop complexe. En fait, le problème majeur était que je ne l’aimais pas et qu’il m’aimait. Une relation faussée, déséquilibrée : lui toujours en demande, moi toujours sur l’esquive. Après plusieurs mois et de multiples hésitations (je n’aime pas faire souffrir et je n’avais pas grand-chose à lui reprocher), je mis fin à notre relation, tout en pensant que j’avais sans doute tort, puisqu’il était beau, intelligent, cultivé et amoureux.

À cette époque, il courrait une heure chaque jour, ce qui me semblait totalement extravagant. Quelques années plus tard, à mon tour, je courrais avec grand plaisir. J’en conclus qu’en ce temps-là, j’étais inapte à l’amour et à la course.

Et voilà que, quarante ans après, il croise mon nom sur la toile d’araignée du monde et  me propose de prendre un pot.

– Attend, attend, ça fait un moment, nous ne sommes plus des jeunots. Est-ce bien raisonnable ?

Je tergiversais, gagnais du temps. On s’est écrit pour se raconter, vite fait, les quarante années écoulées.

Après cette période d’échanges épistolaires et un coup de téléphone : plus rien.

J’échafaudais des hypothèses…

Il avait retrouvé les photos qu’il prenait de moi. Il y en avait de fort belles et je n’étais pas mal du tout, ce dont je n’étais pas consciente. Et donc, il avait éprouvé de la nostalgie pour le passé.

Autre possibilité, se retrouvant seul, il fouillait son carnet d’adresses pour remédier à sa solitude : classique.

Ou bien, son intention était de me séduire de nouveau, puis de me quitter pour venger sa jeunesse.

Photo : les protagonistes – CB par TC

avec la participation de Calderón

Affiche : « La vie est un songe »