Calendriers et Agendas abolissent la « trêve des confiseurs », imposant une reprise en mains.

Par facétie ou jalousie, quelques pages d’un ancien agenda en profitèrent pour s’échapper d’une pile de papiers. Nulle trace de l’année… Pourquoi les avoir arrachées et entreposées ?

– Des noms d’entreprises griffonnés, inconnus à part quelques maisons d’éditions que j’envisageais sans doute de contacter.

– Un lieu inscrit en rouge se situant dans le département 63. Voyons voir… 63 : Puy-de-Dôme…

– Divers itinéraires ne précisant pas leur destination finale.

– « Bas mediven 30 médium court 40°. » Aucune idée de ce que cela signifie !

– Figurent aussi des prénoms avec téléphones : plusieurs amis et connaissances les partageant, il me faudrait prospecter :  Bonjour… Heu, qui es-tu ? Moi je m’appelle…  Une approche qui achèverait de me couper du monde.

Un policier :  C’est bien votre agenda et votre écriture ? Et, nonobstant ce fait, vous prétendez ne pas connaître ces gens !

Je plaide la négligence et j’en conclus qu’il faut ou bien inscrire toutes les précisions ou s’abstenir de noter quoi que ce soit. (Je jette un regard hostile à l’agenda tout neuf.)

Une autre page, chiffonnée, énumère des livres. Ai-je tenté de me les procurer ? Les ai-je lus ?

Plus loin, une liste de tâches à accomplir…

Ces pages qui témoignent de ma vie, me laissent perplexes : une sorte d’amnésie.

À l’inverse, je garde des agendas qui concernent des évènements essentiels, mais trop perturbants pour que je les consulte. Cette fois, il s’agit d’un excès de mémoire.

Comme toujours, je cherche dans le mot même une explication : agenda – terme d’origine latine :  ce qui doit être fait  ou mieux  [les choses] à faire.

Si j’ai accompli ces actes, lu ces livres, rencontrer ces personnes, pourquoi avoir conservé ces pages ?

Je me propose de détourner le nouvel agenda et d’y inscrire ce que j’aimerais vivre.  Samedi :  Manifestation littéraire de… cadre agréable, visiteurs curieux, conversations passionnantes, nombreuses ventes, proposition de lectures…  Mercredi :  Billets  pour le Trans-Europ-Express… Ceci ressemble à un carnet de bord, or seuls les capitaines de navire les remplissent, à terre on tient un Journal et qui serait assez fou pour tenir un faux journal ? Pour tromper qui ?

Je rassemble les pages de l’agenda, quelques articles mis de côté, quelques notes pour un futur livre. Je dispose le tout sur les chenets avec brindilles et allume-feu : j’approche l’allumette.

J’aurais dû agir ainsi dès le haut de cette page. Bonne continuation.