Dix mots

Ah les concours littéraires ! Voici les dix mots imposés (en italiques) à introduire dans un texte. Ce que j’ai fait avec un soupçon de facétie.

Le règlement du concours littéraire de Toulouse avait, comme d’habitude, un côté chafouin : c’est la marque des règlements et des concours en général. S’il en était autrement on considérerait le ou les concepteurs du projet comme des fadas s’ils habitent en dessous de la Loire et des cinglés pour le reste de l’hexagone.

Lors de ses manifestations culturelles, la ville rose aime inviter les Parisiens voire même d’autres estrangers. Au passage, on grappille leurs mots pour les disposer sur les pavés de la Place du Capitole.

Cette place aime se faire belle quoique gironde en absolu, elle se farde alors de falbalas, de paillettes et autre poudrerie.

À une époque, le Salon du Livre s’y tenait sous des chapiteaux blancs. Les auteurs y étaient accueillis en toute gratuité et les visiteurs passant ou les passants visiteurs étaient nombreux. Par la suite, on prétendit que le sol était trop fragile pour recevoir le poids des mots.

Nous ajustions nos lunettes et nos lumerottes pour faire nos dédicaces et nos lectures. Nous tenions la dracher haute aux analphabètes et béotiens qui plastronnaient (infiniment moins qu’actuellement). Ils nous faisaient des risettes mais nulle ristrette n’eut été tolérée. C’est avec vigueur et vigousse que nous discutions avec tout un chacun et les autres.

Des musiciens se joignaient à nous avec leurs tam-tam et leurs tap-tap, nous chantions, nous dansions. Nous étions en bonne compagnie et champagnés de concert.

Que reste-t-il de ces manifestations peu coûteuses mais fructueuses pour tous, que restent-ils de nos mots d’alors, de nos mots d’amour et de leur polyphonie ?

Des mots comme une ouverture / Pour panser nos déchirures…

 

Bien entendu, ce texte ne fut pas retenu. L’année suivante les mots proposés furent : hi-tech, tendances, spinning, taclé, procrastination, finalisé, libéral, cotation, bulle, domotique.

Mieux vaut jouer seul. Il suffit de se munir d’un crayon, d’un dictionnaire ou d’un livre (un bon). Fermer les yeux, écarter les pages, pointer le crayon sur un mot innocent,  dix fois de suite (ne pas tricher). Après quoi, il convient de les insérer parmi d’autres mots. Parfois surgit un poème ou une histoire… Il est également possible d’écrire les mots sur des bouts de papier et de les avaler ou encore de les amalgamer à des pâtisseries. La madeleine donne de bons résultats.

Aujourd’hui, je ne sais pourquoi, ces pratiques m’attristent.

Sculptures Jacques Rival – Photo CB