Mexique et gilets jaunes

Ayant pu me faufiler entre les barrages des gilets jaunes, je décollais de l’aéroport de Toulouse, le 28 novembre 2018, pour le Mexique, inconsciente du fait qu’un décalage de douze heures allait épuiser rapidement mon énergie.

Ébaubie, je parcourais les rues de Mexico, grimpais  sur la pyramide du soleil de Teotihuacan, achetais dans le marché indien d’Oaxaca du « papel amate » papier confectionné à partir d’une écorce d’arbre pour réaliser, avec l’aide de quelque comparse, un livre d’artiste. Puis, je partis à l’assaut du site de Tehuantepec, dégustais, pour me remettre de ce bel effort, du mezcal tiré d’un sympathique agave et m’apprêtais à parcourir, en barque, les gorges d’El Sumidero qui abritent sur leurs rives : crocodiles, singes, oiseaux, lorsque je fus stoppée dans mon élan touristique par un barrage dans le Chiapas, le 3 décembre.

Des files de camions, de voitures, des gens marchant vers l’avant, vers l’arrière, avec une bassine sur la tête, des valises, des enfants en remorque,  allées et venues incohérentes… En compagnie de notre guide Mexicaine, Suzanna, une petite femme tonique, rieuse et cultivée, nous atteignîmes la tête du  barrage. Il y avait là tout un village indien : enfants, femmes, hommes au milieu de tentes et de banderoles qui obstruaient parfaitement la route. Seules les  deux lignes tracées sur l’asphalte étaient jaunes. Les revendications étaient précises : « Nous sommes enclavés. Enfants, anciens, nous nous levons cinq mois sans lumière, sans chemin, sans eau potable, ni docteur ni médicament. Monsieur le Gouverneur nous exigeons électricité et eau.  Justice pour le « Vieux village ».

Nous attendîmes plus de 9 h le gouverneur qui ne vint pas. Notre car exécuta moult manœuvres pour faire demi-tour et nous reconduisit à la ville dont nous étions partis le matin. Après un repas improvisé, nous pûmes dormir quatre heures avant de tenter un nouveau passage : aucune autre route n’étant possible. Il faisait nuit, le barrage était partiellement et provisoirement levé. Comment ne pas être solidaires avec leur demande ?

Le voyage se poursuivit vers le Golfe du Mexique et d’autres sites qui nous attendaient dans la forêt tropicale, jusqu’à Tulum, site Maya au bord de la mer des Caraïbes dans laquelle nous n’avons pu nous plonger : il fallait reprendre l’avion.

Après l’atterrissage à Toulouse, roulant vers le Lot, je passais un barrage de gilets jaunes qui me parut de petite taille.

Hasta la vista !

Photo CB