Libertés

Sans doute faut-il défendre les libertés, mais la liberté des uns n’est pas la liberté des autres. Ceux qui pensent perdre la leur en portant un masque en temps de pandémie, en respectant un couvre-feu… m’étonnent. Pendant la guerre, officiellement la dernière, la France était occupée (OK, moi non plus je n’étais pas née) : couvre-feu, attestations, arrestations… Les jeunes ne pouvaient pas danser, les théâtres fermaient tôt, les gens avaient faim, une étoile rose décorait les homos, les juifs une jaune, parqués, spoliés, déportés, assassinés, ajoutons les Tziganes ainsi que des hommes de conviction. Il y avait la milice, le marché noir, des résistants et les autres. Voilà pour le passé.

Au présent, avant la covid, pour ma part je ne me sentais pas libre puisque mes livres — l’essentiel pour un écrivain — édités chez un petit éditeur se trouvent rarement en librairies. Les libraires étant démarchés par les commerciaux des maisons d’éditions importantes, influencés par des médias ciblés et coincés dans un système d’envois d’office et de retours d’office. Bien évidemment, les petits éditeurs ne peuvent pas postuler pour les prix littéraires basés sur l’envoi massif des services de presse et autres pratiques. À leur tour, les libraires pour assurer quelques ventes démarchent les bibliothécaires, du moins dans ma région. La boucle est bouclée. Cadenassée.

L’endogamie dans les arts, l’entre soi avec les risques de consanguinité dégénérative, d’incestuosité communicative existent comme dans certaines grandes familles.

Bref, je n’étais pas libre, comme bien d’autres artistes talentueux : peintres, sculpteurs, musiciens, le virus ne jouant aucun rôle dans ce confinement. Ils ne peuvent se faire entendre et après cet épisode tragique le silence continuera de les engluer.

« Il faut abattre les murs. » mais lesquels ?