Voyages

Beaucoup aiment les voyages.  Sans doute d’authentiques voyageurs capables de se fondre dans l’ailleurs ou animés d’un désir de fuite.

Je ne sais pas voyager. Pourtant, je me souviens d’impressions fortes :  en contemplant la végétation tropicale de Cuba, en gravissant un escalier taillé dans des roches colorées au Maroc, en ressentant la touffeur de la mer rouge si chaude que l’impression de liquidité disparaissait. À Moka, au Yémen, mon regard suivait l’hélice accrochée au plafond de la chambre conforme aux films en noir et blanc. Ou encore dans ce village perché où Pasolini avait tourné Les mille et une nuits, quand vautrés sur le tapis d’un dortoir de gîte, nous nous gavions de beignets au miel et de thé à la menthe.  Uniquement accessible par un  chemin à flanc du piton, je me suis écartée  côté  ravin pour laisser passer un âne qui descendait,  son chargement volumineux a failli me précipiter dans le vide.

Je pourrais extraire d’autres moments intenses de séjours en Espagne, en Italie, de mes courts voyages à Prague, à Vienne, au Monténégro, en Sicile, au Mexique, au Portugal, mais je ne les vis  que comme des parenthèses.

Seuls mes voyages immobiles d’écrivain m’emportent durablement.