Noël 23 : me revoilà !

J’existe depuis des siècles, mais c’est au XXe siècle que ma multinationale s’est développée de façon exponentielle.  Fondateur, PDG, actionnaire, j’ai travaillé mon image et ma COM. D’abord mince, vêtu de  vert, j’ai viré au rondouillard rouge, plus festif. J’arbore une barbe blanche postiche pour rassurer.

Autrefois, j’apparaissais le 24 décembre et me retirais le 30 afin de laisser place à un collègue : je possède des parts dans sa holding. Désormais, je me répands dès novembre en guirlandes, devantures et marchés de Noël. Je surveille cette citrouille d’Halloween et le black Friday aux dents longues : deux Américains sans scrupules.

Mes détracteurs voudraient me faire tomber de mon traîneau. Ils se plantent ! « Le père Noël est une ordure » a renforcé ma notoriété. Dans un irréductible village, un lutin, un gnome et un farfadet résistent et m’asticotent chaque année. Les pauvrets, que peuvent-ils  contre la puissance du rêve (et de l’argent) ?

Bon prince, j’ai décidé d’acheter tout ce petit monde par des cadeaux. La cape de l’invisibilité avantagera le gnome, la tenue du Chevalier noir  confortera  le lutin, le farfadet travesti en fée  gagnera en taille et en consistance. Reste à corrompre le meneur : un écrivain qui se fait un sang d’encre. Ma hotte contient un éditeur de renom, un prix littéraire et une plume d’ange. J’hésite.