Nègre blanc
Printemps des poètes 2017 – Thème : Afrique (s)
Je me sens nègre dans le rejet
nègre face au mépris diffus
nègre dans le regard retenu
nègre sous les insultes lancées
nègre quand femme on me tutoie
quand la publicité m’exploite
lorsque des passants me tripotent
leurs yeux collés aux seins et plus bas
qui me détaillent et m’humilient
nègre quand de force on me marie
nègre quand femme on me prostitue
nègre quand femme on me viole et tue
nègre hors de la négritude
nègre du fond de ma solitude
noire pour les blancs blanche pour les noirs
sans passé sans futur sans Histoire
nègre au froid nu de la misère
repue aux ventres des famines
étrangère au milieu des ruines
blanc face aux fous génocidaires
Ne sachant ni crier ni prier
refusant de penser aux charniers
j’envoie dans l’effroi dons et chèques
pour ces contrées tant exotiques
À Paris – debout dans un bus plein
seule de ma couleur sous les regards
aigus ou railleurs de la plupart
je murmure ces mots d’écrivain
Photo Sculpture (détail) de Kayetan
4 Comments
arbouge novembre 28, 2022 - 10:31
J’avais associé ce poème à une gravure de Bernard Coulomb inspirée des baigneuses de Picasso. Le tout sous verre. Une femme me l’avait acheté à La fête du livre et de l’image d’Arcambal en 2017. Je l’ai revue hier (27 novembre 2022) à ce même Salon et nous avons échangé à son sujet toujours d’actualité !
Guy poésie novembre 28, 2022 - 10:25
Merci Colette pour ton excellent poème d’écrivaine ; la malvie contre laquelle des Créateurs des arts majeurs s’intéressent, osent des chants inédits et nouveaux, des oeuvres inédites et nouvelles. Grande amitié. Guy
arbouge avril 26, 2017 - 16:18
Merci pour ta réaction, mais… Un texte sur les Afrique (s) peut difficilement être gai. Comme je ne suis
pas noire, j’ai pensé à la phrase de Léo “Je suis un nègre blanc qui se fait
chier à manger du cirage…” Quelques souvenirs me sont revenus :
– J’étais sur le Boulevard Saint-Michel, j’avais vingt ans et des
poussières. Un noir m’a draguée, je l’ai envoyé bouler. “C’est parce que je
suis un nègre !” “Les femmes sont des nègres partout, c’est pour ça que
vous me tutoyez et m’interpelez…” Il est resté ébahi, puis
s’est excusé.
– Un autre noir m’avait draguée.(rue des Haies dans le 20e) Il m’a demandé l’âge de ma mère, après il a
soulevé mes lèvres pour voir mes dents. Puis m’a proposé le mariage… Cette fois là, je ne me suis pas mise en colère.
– Un autre souvenir, dans le métro. Un jour, un type, un blanc, m’a pincé les fesses. (Douloureux.) Je l’ai laissé passer devant moi et lui ai empoigné le cul en serrant le plus fort possible. Il s’est retourné : affolé. Tellement, que je me suis demandée si je ne m’étais pas trompé de mec !!! J’en ris encore…
J’ai été sidérée de lire des articles, actuels, sur les transports à Paris
et de voir toutes les femmes qui sont encore tripotées, je croyais vraiment
que c’était du passé !
Tu vois, ce n’est pas une vision de ma part. Et
d’autres femmes prennent le relai :
Causette par exemple, celles qui portent des barbes et les Fémens…
Gérald avril 26, 2017 - 16:05
« Ceci est un beau texte, qui me rend très triste. Certainement
plein de Vérités mais il existe d’autres visions de LA FEMME, bien plus
belle. Mais c’est ta révolte. » Gérald