Du coup…

« Du coup, voilà : c’est compliqué… » En 2016 ici même, j’avais proposé une chasse aux « voilà » : échec total. Ils ont proliféré dans leur vacuité intégrale puisque ce « vois là » ne montre rien, ne dit rien. Chacun doit s’en méfier comme du virus, car du jour au lendemain vous pouvez, à votre tour, ânonner un voilà d’importance (quant au ton). Quelles mesures barrières appliquer ?

J’écoute une radio culturelle que j’apprécie, hélas ! elle s’est contaminée, touchant journalistes et invités de renoms ou œuvrant dans des domaines d’activités qui auraient dû les protéger contre ce mot béquille qui a balayé les mots endémiques précédents comme « de fait » ou le traditionnel « heu » lourd au niveau sonore, mais au moins non trompeur. Donc, à l’écoute de ma radio préférée, sourcils froncés, index menaçant je fixe l’appareil :  « Encore un voilà et je te coupe ! » Je dois m’exécuter. Parfois, je le confesse, je rallume le poste après quelques minutes de silence apaisant.

L’invasion tout aussi horripilante et creuse du « du coup », parfaitement laid et inutile, mais empreint de jeunisme, aurait pu repousser le voilà, or ils cohabitent, sans doute parce que l’époque est « compliquée » en tout domaine : santé, culture, commerce, nourriture…, voire très compliquée. Dans ce cas, je propose complexe : je suis renvoyée dans les cordes. J’avance « embrouillée » : on m’ignore, « incompréhensible » nul ne m’entend, embarrassée ? Je lance « amphigourique » pour pouvoir repartir dans ma solitude de plus en plus extrême.

Un autre synonyme, dans le registre gros mot, me tire par la plume, je lui souris : oui, tu serais infiniment plus adéquat et je pleure.

Photo : place des écritures à Figeac