Plus si affinités

Quelques échanges de courriels à propos de mes écrits, suivis de points de vue croisés sur les arts, les mathématiques, le cosmos… Discussion agréable de bon niveau,  de plus en plus rare. Nos centres d’intérêts divergeant, les découvertes se succédaient. Répondre nécessitait du temps ; parfois, l’un ou l’autre en manquait générant des questions en attente.

La période estivale provoqua une interruption. La reprise épistolaire fut plus…, enfin moins vive, moins stimulante. Surgirent des interrogations comme : ce que l’on aimerait faire et que l’on ne fait pas… Pour ma part, les voyages arrivaient en bonne place. Lui glissait des sous-entendus que je négligeais.

Certes, internet favorise ce registre, mais cet homme  étant le fils d’un vieil ami… Néanmoins, sa curiosité à l’égard de l’intime s’aiguisait. Confidences entre un homme et une femme, pourquoi pas, cependant c’est en tant qu’écrivain que j’avais accepté ce lien. Du reste, à l’occasion je l’orientais vers tel ou tel de mes écrits. Il récidiva, j’éludai : peu à peu nos échanges cessèrent.

Ceci me rappelle une autre histoire. Un internaute inconnu ayant lu mes nouvelles me proposa de réaliser un roman en commun : chacun rédigerait et transmettrait un chapitre par le réseau, sujet ouvert. Il m’invita à commencer.

Sur la réserve, j’écrivis une introduction qui n’engageait pas dans une direction précise, lui laissant la main. Progressivement, il orienta  le récit. Assez dubitative quant au résultat, je finis par me prendre au jeu d’autant qu’une dimension artistique et historique se dessinait. C’est alors qu’il me congédia sous prétexte que je semblais manquer d’enthousiasme et que je maniais  trop l’ironie.

Cette rupture m’affecta. D’une part je n’aime pas perdre mon temps, d’autre part j’estimais sa façon de procéder machiste : il m’avait contactée, persuadée, influencée et au moment où j’adhérais véritablement au projet, il décidait unilatéralement d’y mettre fin. Un schéma de drague !

Déçue, je repris l’ouvrage, transposant ses thèmes, gardant ses personnages sous d’autres noms tout en conservant leurs caractéristiques. Et j’écrivis seule un livre à « quatre mains » en me mettant à sa place en alternance. Le roman s’intitule « Pas de deux ». Plusieurs lecteurs l’apprécièrent. J’envisageais de lui envoyer un exemplaire, mais je me méfiais un peu de sa réaction, je ne connaissais de lui que son nom (un pseudo ?) et une adresse : rue Saint-Honoré à Paris.

Pour en revenir au fiston, notre relation n’était pas littéraire, disons plutôt amicale, quoique… Finalement, son attitude ressemble à celle de son père : un vieux monsieur qui émaillait son discours de propos égrillards, affirmant que tous les hommes sont des « queutards », je n’aimais guère cette expression, ni même cette autre qui pourtant me semble appropriée : les chiens ne font pas des chats.

Dessin à l’encre R. Chartrain