Une rue, un soir

Derrière une fenêtre, une femme feuillette un livre. Sur la chaussée des individus se croisent, occupent l’espace, marquent le temps de leur hâte ou leur flânerie : chaque silhouette porte son histoire. Des vibrations traversent leurs ombres qui ricochent en reflets déformés sur le trottoir mouillé ralentissant imperceptiblement leur trajectoire.

Ils passent devant un trompe-l’œil mural qui représente une femme vêtue de rouge. En face, un autre déborde de livres serrés sur des étagères de guingois.

Un chien gris, hirsute suit les gens de ses yeux tristes. De temps à autre, il remue la queue pour attirer attention et caresses, en vain.

Sur le mur, un écrivain perdu au milieu des bouquins darde son regard sur chacun. Il agite les mots qui poussent sur ses doigts et sur ses lèvres. Leurs échos se répercutent dans les pages et dans la rue, mais seul le chien les perçoit et les comprend. Aussi, il se dirige vers la paroi, fouine de son museau la surface rugueuse pour la forcer et rejoint l’écrivain qui s’assoit et l’enlace.