« Reportage »

Prendre des photos lors d’un voyage organisé relève de la mission sinon impossible du moins acrobatique. Il y a toujours un membre du groupe qui se profile juste en plein milieu. L’option : rester en queue et attendre que l’horizon se dégage comporte deux risques majeurs : se perdre et se retrouver englué dans d’autres cohortes.

Situation classique, mais dépassée ! Désormais, on bute sur des jeunes filles maquillées, bijoutées, en robes longues reproduisant des poses stéréotypées sous les focus de leurs compagnons. Je crus tout d’abord à un tournage, mais ces scènes se multipliaient et « les artistes » confisquaient tout l’espace sans le moindre scrupule. J’aurais dû pousser la fille dans le bassin, celui censé refléter les bâtiments et les fleurs. Je suppose que le soir même, les clichés ou la vidéo se retrouvent sur un réseau. Et si j’avais capté ces images, comment auraient-ils réagi ?

Dans notre groupe, deux femmes toujours en tête se prenaient sans cesse en photo sur le paysage à admirer, sur la porte décorée, devant les statues… Tant d’extravagance me suggéra un amour naissant. Bien qu’ayant remarqué la similitude de leurs mollets ! On me confirma qu’il s’agissait d’une mère et de sa fille. Comment expliquer un tel comportement ? Un deuil récent, une séparation prochaine ? La jeune se prêtait en souriant à ces arrêts sur images. Le reste du temps, elle me jetait des regards noirs, ayant sans doute perçu mon agacement.

Durant ce voyage, j’ai mitraillé excessivement dans l’espoir de ressentir, plus tard, une émotion face à un cadre vierge dans Séville la blanche, la sobre.

Sur la photo jointe apparaît un demi-chien pattes croisées : il me ravit.